Le 6 qui prend
J'avais envie de partager ma version de la dernière journée des Dolomites, non pas parce que je pense mieux faire que notre narrateur habituel qui a encore une fois magnifiquement retranscrit notre semaine magique aux Dolomites. Mais parce que j'avais tout particulièrement apprécié ce vol de "groupe". Oui "groupe" entre guillemet, car on n'a pas vraiment volé côte à côte, mais on a tenté le même vol, plus ou moins, en désynchronisé.
Alors pour en revenir à ce vol sympathique, tout a commencé par un plouf entre acharné, oui cette année, j'en fait parti, et pas JB, les sessions dolomites s’enchaînent et ne se ressemblent pas, le salop s'étant déjà bien gavé de vols à faire saliver tout le club les semaines précédentes.
Je m'élance donc pour un plouf classique d'avant cross. Je commence donc par mon exercice favori, travailler le petit. Aujourd'hui, pas de Philippe ou JB pour jouer à qui tiendra le plus longtemps. Je me maintiens tant bien que mal, ça zérote, mais c'est normal pour l'heure (~10h).
Antoine s'élance à son tour, il décolle un peu plus sur la gauche, et tombe direct sur un autre thermique. C'est bon, j'ai un compagnon de jeu pour "à qui tiendra le plus longtemps". Au bout de quelques minutes, je comprends vite que je me fais laminer en beauté, le bougre a déjà pris 100m. Improbable à cette heure-ci. Mais je ne lâche pas l'affaire, je m'acharne dans mon zérotage, mon thermique va bien se mettre mieux en place au bout d'un moment.
Vincent décolle à son tour du même endroit que moi. Je me dis qu'à 2, c'est foutu, on ne tiendra jamais dans ce thermique asthmatique. Mais le président est sympa (si, si, ça arrive), il me laisse dans ma misère de thermique. Entre temps, je vois un Toinou qui est déjà perché. Punaise, c'est frustrant, je misère comme un diable de mon côté.
Finalement, je réussis à gagner quelques mètres, puis quelques dizaines de mètres,... J'ai presque rejoins Toinou au plaf. Ce dernier commence sa transi sur les faces Est de l'autre côté de la vallée. Je trouve ça couillu. J'avais déjà testé, certes plus bas, mais ces pentes herbeuses m'avait plombé sans pet de mouche exploitable. Il est parti de plus haut, mais je n'y crois pas, je décide de tenter le sud en mode rase-mottes. Je pars de 2600 au lieu des 3100 habituels. Dans ma transi, Antoine m'informe qu'il va poser en fait, ce n'était pas un coup de poker pour tenter la Marmo par les faces est, juste l'envie de mieux s'équiper pour ces conditions inattendues.
Perso, j'ai pas mon équipement classique, mais au plaf, je n'ai pas froid, je peux tenter ma transition radada. Au pire, je pose, et je m'équipe aussi. Au mieux, j'ai le ciel pour moi tout seul. :)
Je finis ma première transi vers le sud, vers un endroit qui est réputé pour pas donner grand chose, un mélange de forêt ravagée et d'alpages, snobé toute la semaine. Mais aujourd'hui, je n'ai pas ce luxe. Si je veux aller plus loin, je dois travailler le petit. Je me mets donc à la tache, mais très vite un thermique me remonte à mon plafond de 2600 d'avant transi. Allez, je peux continuer. Je chemine, je perds de l'altitude, mais je tente la transi d'après. Au pire je devrais encore pouvoir revenir pas trop loin de l'atterro en finesse. Et de l'autre côté, il y a du caillou éclairé. Mais de ma maigre expérience, il ne donne pas grand chose. Cette fois-ci pas de miracle, rien de vraiment exploitable. C'est pas grave, c'était déjà un beau plouf.
Avant de rentrer, je tente ma dernière carte, je m'avance un peu vers la vallée, vers la où j'avais vu des ailes sortir les jours précédents, certes arrivant plus haut, mais ça se tente. Rien,... rien,... rien,.... un pet de mouche,... un pet de mouche qui a mangé des flageolets,... plusieurs pets de mouches qui ont mangé des flageolets, et vlan un vrai thermique, yes, nouvelle main. C'est reparti, je retrouve mes 2600.
Mais maintenant, un autre joueur est dans la partie. Le redoutable J-Bouille la fripouille.
Il va falloir garder mon avance. Mais je suis avantagé, les nuages sont bas, et voler bas, c'est ma spécialité. :)
Par contre, je suis seul au monde, mais pour le moment, je connais encore le chemin. Les jours précédents, mes plafs étaient quand même plus haut. Avant la prochaine transi, j'essaie de gagner quelques mètres sur le bord du nuage, et banzaï à 2700.
Finalement, j'arrive assez haut après cette transi, presque trop, je suis presque dans les nuages. J'essaie de me placer pour cheminer à un endroit qui ne monte, ni ne descend. Perdu.
Je fais un nouveau point bas. Je peux presque faire des checks avec les randonneurs, qui me prennent pour une star, le shooting photo commence alors que je suis en pleine galère pour sauver mon vol. Je finis par trouver un petit 0.7m/s qui m'amène tranquillement au nuage à 2700, cette fois-ci, ça monte pas top sur le côté des nuages, et la transi de la Carezza est ultra longue. D'un côté, on m'a dit que cette transi est magique, qu'on perd très peu d'altitude, d'un autre, de mon souvenir personne n'est parti d'aussi bas. Bon, ça fait 3 fois que je fais demi-tour ici. C'est ma dernière chance, allez, feu (et puis, il y a Philippe qui m'a répété qu'il viendrait me récupérer si besoin).
Et la, le miracle se produit, je réussis à raccrocher de l'autre côté sur une paroi rocheuse bien éclairée.
Maintenant, territoire inconnu, avec un JB qui se rapproche à coup d'accélérateur, (encore 1 ou 2 transi derrière) suivi par un Rémi (1 transi de plus) et Antoine et Philippe à la suite, mais discret à la radio, je ne sais pas trop où ils sont.
La transi d'après me parait hasardeuse, je vais faire du tourisme. J'ai un peu de marge, et au pire JB me montrera la suite. Je bifurque perpendiculairement à la vallée, vers des paysages paradisiaques, très minérales. J'arrive sur une sorte de plateau. Je vise les crêtes qui sont derrière en calculant constamment ma finesse, pour voir si je peux en sortir sans poser sur ce plateau si je ne trouve pas de thermique salvateur. Mon exploration ne donne rien, ma marge s'amenuise. Je finis par lâcher cette solution et tente de passer plus en vallée.
Ça passe! Je continue. Je finis par arriver au bout de la vallée.
Maintenant il faut transiter de l'autre côté de la vallée et affronter le soaring de la mort...
J'arrive au lieu-dit du "soaring de la mort", et je commence à comprendre pourquoi cette endroit s'appelle ainsi. Ça bouge pas mal, et vu la proximité avec les sapins, je peux presque les toucher avec les pieds. Ça me rassure étonnement. Me faire bouger comme ça avec 500m de gaz m'aurait fait poser rapidement. Mais la, je suis dans mon élément de St Hilairien.
Au bout d'une demi-heure de machine à laver, JB a fini par me rattraper, mais il est bien plus haut et pourra continuer son vol. Bravo JB. Malgré ses encouragements, ma vessie se fait trop sentir, et je n'ai pas trop envie de tester la fonction rinçage-sellette de la machine à laver. Je finis par lâcher l'affaire.
Je file donc en vallée, poussée par la brise, en essayant d'aller le plus loin possible. Les faces ouest ne sont pas éclairés, je perds de l'altitude rapidement, je passe en faces est pour prolonger un peu mon vol. J'arrive à raccrocher très bas, ça descend toujours, mais moins vite. Je trouve un 0,5m/s radada, mais ma vessie et la fatigue ne me permettront pas de l'exploiter à fond, juste de quoi pouvoir rejoindre la vache d'après.
Je fais pipi, au moins 3 litres. Je plie ma voile, comptant sur la proposition de Philippe pour rentrer facilement. Problème, Philippe est aussi vaché un peu plus loin. :D Et un peu plus loin, pour un piéton, c'est 1 heure. 3 heures jusqu'à l'appart'...
Romain, d'abord hésitant pour faire le trajet juste pour une personne, viendra finalement nous sauver. JB finira aussi par se vacher, puis Antoine. Et Rémi cratérisera, c'est le 6 qui prend. Faute de place, il devra rentrer à pied ou en volant...
Traces :
Lionel : https://www.syride.com/fr/pilotes/Lionel/1125260
JB : https://www.syride.com/fr/pilotes/JBC/1125479
Antoine : https://www.syride.com/fr/pilotes/Antoine83/1125336
Rémi : http://xcglobe.com/pilots#show-flight/2375312/ et http://xcglobe.com/pilots#show-flight/2375313/