Expédition dans le Trièves
Des beaux plafs annoncés malgré la chaleur. Une motivation du club pour tester un nouveau site pour certain. Une envie de faire le tour du Trièves pour d'autres. Tous les ingrédients réunis pour faire un beau vol en théorie. En pratique, c'est devenu une vrai expédition !
Une belle motivation pour aller découvrir ou redécouvrir le Col Vert dans le Vercors. Les plafs ne sont pas fous au Nord mais le Sud semble plus prometteur. Un petit tour du Trièves semble plus qu'adéquat pour cette journée. Nous sommes donc 8 mais je sais que seul Antoine et moi partirons au Sud, ça fait longtemps qu'on en parle.
Il ne sert à rien d'arriver trop tôt parce qu'il faut attendre que les faces de Courtet et les faces du Taillefer se mettent en marche. Un décollage entre 11h30 et 12h me semble suffisant.
La montée au Col Vert s'effectue un peu dans la douleur de la montée sur une face Est pendant de fortes chaleurs. Heureusement, il y a quelques arbres pour nous maintenir à l'ombre et le chemin n'est pas si abrupte que ça. Nous prenons notre temps mais arrivons à la cabane avec quelques gouttes de sueurs.
Comme il est encore tôt, nous trouvons un coin à l'ombre pour discuter, rigoler et manger un morceau. Les autres me font remarquer qu'on est les seuls à décoller d'ici. Je cherche une raison pour les rassurer, c'est les vacances, les plafs pour aller au Nord ne sont pas terribles et les crosseux qui viennent ici veulent faire des bornes. En fait, je ne sais pas trop pourquoi il n'y a personne mais je ne veux pas tomber dans la psychose, ce n'est pas parce qu'il y a personne que ça ne le fait pas !
Après avoir mangé, il est temps d'aller se préparer. Je fais un topo rapide aux autres sur les possibilités d'atterrissage, les thermiques du coin, etc. Comme JB n'est pas là, je vais faire le fusible, je suis, avec Antoine, celui qui connaît le mieux le coin, c'est normal. Je décolle et fonce vers le thermique en bas à droite du décollage. Il n'est pas fameux mais il me permet de remonter au dessus du décollage, j'avance ensuite sous les falaises, vers le Sud.
Je trouve un premier truc, mais c'est tout mou. Je commence à comprendre pourquoi on est seul ici, l'inversion est plus haute encore que le décollage... Antoine est sur mes talons, il galère également à trouver un truc. Pourtant je vois des voiles perchées sur les crêtes et je me demande bien d'où ils viennent comme ça si tôt. Villard ? Trop tôt. Serpaton ? Ils ont du bien galérer à s'extraire alors. Ailleurs ? Il y a un site inconnu ailleurs ? Ou alors ils sont partis du Col Vert avant qu'on arrive sur place ? Plus logique déjà mais il n'y avait pas de voitures au parking.
Je fonce vers les Deux Sœurs un peu mieux orienté au soleil pour espérer y trouver un truc. Je zérote le long de la falaise et soudain le vario m'indique que cela monte, doucement mais sûrement. Au loin, Antoine est encore plus bas, au dessus de la foret. Je monte sur les crêtes et décide alors de continuer seul. J'avais espéré avancer à deux pour faciliter tout ça mais je ne sais pas s'il va sortir ou pas.
« Je viens de m'extraire au dessus des crêtes ! Si vous dépassez 1800, c'est plus facile. » annonçais-je en radio. En y pensant, c'est peut être pour ça qu'il n'y a personne au Col Vert, la couche d'inversion est au dessus à cause des fortes chaleurs et du marais barométrique.
Pas de nuages au dessus des crêtes, du pur thermique bleu. Je chemine en direction du Sud en montant petit à petit. 2300m, 2400m, 2500m. J'ai connu des cheminement dans le coin plus musclés, à éviter les nuages et à éviter d'être trop bas. Même les Deux Sœurs sont gentilles aujourd'hui. En radio, j'entends rapidement que les autres ont décollés.
En arrivant au Grand Veymont, Antoine annonce en radio qu'il est enfin sur les crêtes, non sans mal. Une voile est en train d'enrouler dans mon coin et un superbe cumulus est en train de se mettre en place au dessus du sommet. Le cycle démarre, profitons en.
« Et bien moi, je suis à 3200m au Grand Veymont » claironnant à la radio après quelques tours dans le thermique.
« Bien joué Rémi, mais j'ai envie de te taper ! Bon vol » me répond Nicolas. « Nous, on arrive pas à nous extraire. Jess est partie posée. »
« Bon courage ! Je pars pour le Jocou. »
Fort des mes 3200m, je fonce vers le Sommet du Platary que j'atteindrai assez haut. Je me faisais la réflexion qu'il ne fallait pas que je passe sous les 1800m. C'est bon, j'ai 400m de marge. Et le thermique en bout de crête est bien actif pour me remonter à 2500m me permettant de me jeter sur le Jocou alors que les nuages disparaissent de son sommet. Un doute m’envahit. Est-ce que je vais arriver là bas hors cycle ?
La crête avant le Jocou est assez active, c'est bon, je suis dans le cycle, au moins assez pour monter. J'avance sur cette crête pour atteindre le Col du Seysse où des randonneurs me regardent. Les thermiques sont mal organisés, la voile n'est pas contente et moi non plus alors je serre un peu les dents. Après une bataille pour me hisser à 2500m, j'abandonne et décide de transiter sur le Rognon, espérant que les faces Sud seront plus clémentes qu'ici.
J'arrive au Rognon et il n'y a littéralement rien, je ne fais que descendre. J'essaye alors de retourner vers le Nord par le col entre le Rognon et Sommet de l'Aup. Au Sud Est, je suis bloqué, il n'y a que de la foret. Heureusement que j'ai déjà randonné dans le coin, je sais à quoi m'attendre, c'est un superbe alpage. Appuyé par le venturi du col, je pose un peu avant dans cet alpage. J'aurais dû rester en face Nord...
« Rémi, je suis vaché à 1600m. Je remonte au col pour redécoller. »
Je prends alors ma voile en bouchon, pas forcément la peine de la ranger pour parcourir la centaine de mètres qui me séparent de ma nouvelle aire de décollage. Je navigue entre les chardons sous l’œil attentif des vaches qui broutent en plein milieu du col pour profiter du rafraîchissement aérologique. Mon vario bippe quand je monte d'un mètre à pied, c'est énervant et désagréable. La chaleur est pesante, surtout que je n'ai pas ôté ma polaire, mes gants et mon coupe vent.
Finalement, je trouve un coin au col, face au vent, pas trop fort, je réalise un face voile qui me permet d'inspecter l'aile pour vérifier que je n'embarque rien avec moi et je m'élance.
Hélas, mon vol ne durera que 30 secondes, j'atterris en face, sous le sommet de l'Aup. Le vent est de travers sur la pente et je n'arrive pas à gonfler l'aile une nouvelle fois correctement, même en cobra. J'affale, je recommence, je change de coin. Je me dis alors qu'il faut que je monte au sommet pour redécoller mais je n'ai aucune envie de plier l'aile pour la redéplier 300m plus haut. Je me pose la question de monter en bord de fenêtre mais ce n'est pas assez régulier pour que j'y parvienne.
J'affale une nouvelle fois, je retire mon armure de pilote, coupe le vario et je démonte l'aile de la sellette, ce qui me permet de monter la sellette un peu plus haut puis l'aile pour moins me fatiguer. Je suis tellement dans l'optique de redécoller que je ne me rends pas compte de ce que cela implique. En refaisant ma pré-vole, je constate que tout est emmelé. Je passe donc une dizaine de minutes à tout refaire correctement.
Pendant ce temps là, Antoine m'indique qu'il a posé au pied du Jocou, il n'était pas à l'aise avec les conditions qu'il a trouvé là bas. Il a préféré jouer la sécurité. Pas de nouvelles des autres, les radios ne passent plus.
Finalement, je finis de démêler mon aile et reconnecte la sellette et l'accélérateur. Je refais un pré-gonflage de vérification et me pose la question de ce que je dois faire maintenant. J'ai assez de finesse, je pense, pour atteindre la vallée et passer au dessus de la foret et clôturer le vol ici. Mais il est encore tôt, je dois pouvoir trouver un truc et rejoindre Courtet où il sera plus facile de trouver du monde pour rentrer.
Je redécolle et trouve un super bon thermique qui me propulse à 2000m pour passer sur le Ménil puis pour rejoindre Courtet au dessus du décollage. Antoine m'observe en bas alors qu'il est en train de plier sa voile. Il compte rejoindre Courtet en auto-stop pour tenter sa chance là bas et continuer l'aventure.
Au loin, Courtet n'est pas encore totalement en place, les ailes sont sous le décollage. J'ai bien fait de perdre du temps en vachant, sinon je serais arrivé trop tôt. Dans ma transition sur Courtet, je vois 2 ailes s'extraire et je me dirige dans leur direction. Il y a effectivement un petit truc mais ce n'est pas fameux. Je radasse jusqu'à Rochassac en espérant trouver de meilleurs thermiques mais rien.
En revenant en arrière, je trouve un thermique bien formé qui me monte à 2900m. Il n'est plus question de poser à Courtet du coup. Je dépasse les 3000m et prend la direction du Chatel. Mais je dégrade trop pour tenter la transition sur le Coiro directement. Heureusement, un gun m'indique un thermique au Col de la Brèche qui me monte à 2900m. Le thermique n'est pas sympa, pas bien ordonné, difficile à cerner. L'aile n'apprécie pas trop, elle flappe, se ferme sur les côtés, mais plus haut c'est un peu mieux. Une fois encore, je sers les dents.
A 2900m, mon compagnon de thermique se jette sur le Coiro. Je fais de même, au moins je ne galérerai pas tout seul. Mais pendant la transition, je le perd de vue. Je vise le Piquet de Nantes de peur de me prendre la brise qui s'engouffre en direction de Gap. Ma laisse de chien me parait plus prononcée en l'air que sur ma trace... A partir de là commence l'inconnu pour moi.
Je sais qu'il ne faut pas raccrocher sur le Coiro mais sur la Montagne du Roussillon un peu avant. En essayant de m'imaginer les flux aérologiques, j'en conclus qu'il faut que je tape la face Ouest de cette montagne pour pouvoir remonter en thermodynamique au sommet et du sommet atteindre le Coiro. En plus le resserrement en direction de Valbonnais ne me dit rien qui vaille et je préfère l'éviter. C'est un coup à se prendre un venturi.
Je rejoins donc la Montagne du Roussillon et monte bien en thermodynamique sur celle-ci. Au sommet, je retrouve le gun qui m'avait précédé dans le transition. Il est au ralenti sous le Coiro à chercher un truc pour monter. Il avance péniblement le long des pentes. Je tente de le rejoindre et me fait contrer à mon tour, sûrement par la brise qui vient de la Morte.
Soudain, je le vois prendre un truc qui le propulse à 3000m. Bingo, il faut que j'aille le chercher ! Je le trouve à mon tour et me voilà perché à 3300m. Le gun est parti mais il ne reste plus qu'à se laisser glisser jusqu'au Taillefer puis à rentrer à la voiture. C'est bientôt la fin, je me relâche un peu.
Je profite du paysage, les Aiguilles d'Arves, la Barre des Ecrins et autres glaciers s'offrent à moi tel que je ne les avais jamais vu. Derrière moi, il pleut sur le Grand Veymont mais ce n'est pas un orage puisque le vent d'altitude cisaille le nuage en deux, le faisant avancer vers Courtet. Antoine m'indique qu'il a posé après avoir redécollé de Courtet et qu'il rentre en stop.
J'avance sur le Grand Armet en ne comptant plus que sur mon vario sonore, le téléphone étant tombé en panne de batterie. Finalement, c'est pas plus mal d'avoir le bip pour savoir si ça monte. Mais ce dernier m'indique qu'il ne lui reste que 20% de batterie... Je l'avais rechargé pourtant...
Je retrouve un truc pour remonter à 3400m avant la transition sur le Taillefer. Au loin, à l'Ouest, un voile sombre semble s'étendre et chercher à nous atteindre d'ici une à deux heures. Il ne faut pas que je traîne mais je pense avoir fait le plus dur.
J'arrive au Taillefer un peu bas, je n'arrive pas à me refaire, je me positionne mal dans la masse d'air et suis contraint de poser à 2550m, sous le Col du Grand Van, sur un replat d'herbe et de cailloux. Je me suis fait appuyé par le vent qui venait du Col, ce qui m'a plombé. En posant, je me dis que ce n'est pas le moment de se faire une cheville... Ouf, je pose bien sur mes pieds sur un petit carré d'herbe mais la voile retombe sur les cailloux et les suspentes sont difficiles à décrocher. Un chamois m'observe curieux depuis un névé un peu plus haut. Il n'y a pas âme qui vive, il ne faut pas que je m'éternise ici.
Le plan est le suivant, je reprends ma voile en bouchon après l'avoir extirpé des cailloux pointus et autres dégueulasseries du coin et je monte redécoller au col. Ça sera comme un Chamrousse du soir mais sur le Taillefer, même orientation, même type de vol.
Mais beaucoup de questions se pressent dans ma tête. Est-ce que je n'aurais pas du aller poser à la Morte ? Est-ce que le vent ne sera pas trop fort sur la crête pour redécoller ? Est-ce que j'ai ce qu'il faut pour redescendre en sécurité ou pour passer la nuit ici si nécessaire ?
J'élimine une à une les incertitudes. Cela ne sert à rien de penser que j'aurais pu poser à la Morte, je suis déjà posé. Si le vent est trop fort là haut, je peux redescendre à pied, je connais le chemin, j'ai une frontale dans ma trousse de secours. Si je dois passer la nuit ici, j'ai une couverture de survie et de la nourriture. Il y a un lac un peu plus loin pour prendre de l'eau. j'ai une batterie dans le sac pour recharger mon téléphone. Et enfin de mémoire, il n'est pas annoncé trop horrible cette nuit. Bref, allons d'abord voir sur la crête comment c'est, on avisera ensuite.
Une nouvelle fois, je sépare ma voile du reste. Pourquoi ? Je ne sais pas trop à vrai dire. L'automatisme, la fatigue, pas bien réfléchi, trop de questions qui se bousculent. Je remonte donc au col pendant 20 à 30 minutes et trouve un coin sur les rochers où j'étale l'aile et je recommence ma pré-vol. Mais j'abandonne vite, les cailloux sont trop saillants, j'ai trop peur de sectionner une suspente. En contrebas, les crêtes du Brouffier pleines d'herbes me semblent plus judicieuses.
Je sors ma batterie pour lancer le rechargement de mon téléphone et essayer de joindre du monde. Heureusement le réseau passe et j’envoie un message à mes parents rapidement. Je sais que je vais devoir marcher plusieurs dizaines de minutes sur la crête, j'ai besoin des deux mains, je bourre donc ma voile comme un mal propre dans le sac de la sellette réversible et je prend la direction du Petit Taillefer.
Passé ce sommet, je tombe sur une magnifique aire de décollage pleine d'herbe et bien orientée qui m'évite de descendre 300m en contrebas. Je sors ma voile et recommence ma pré-vol en démêlant les suspentes qui se sont mises dans tous les sens. Malgré la fatigue, je me force à faire un pré-gonflage pour vérifier que je n'ai pas fait de bêtises et que le vent n'est pas trop fort. Et je me remet en l'air, bien content de pouvoir rentrer en volant.
Cette fois ci, j'arrête les âneries, je vise la Morte et si je suis assez haut, je vise Laffrey pour poser. Je me fait contrer par la brise de Vizille alors je pousse le premier barreau puis très vite le second barreau pour avancer à 17km/h. Je suis un peu rassuré quand je vois des ailes faire du soaring à Laffrey et je pars à leur rencontre.
Je passe allégrement au dessus d'eux. Le vent est fort mais j'avance au deuxième barreau en ne dégradant presque rien. Je me dis alors que je peux rejoindre le sommet Nord du Conest, faire du soaring dessus et basculer sur le Gua pour la fin, la vraie. Je tente alors d'aller contre le vent rejoindre Notre-Dame-de-Mésage. En arrivant au point voulu, le soaring est en place, c'est un régal, c'est doux et ça monte bien ! Je passe de 900m à 1400m. C'est, je pense, plus qu'il n'en faut pour atteindre le stade du Gua, il était temps.
Je prend la direction de Vif, je ne vais pas directement sur le Gua, j'ai un peu peur de la brise qui va en direction du Lac du Monteynard, je fais alors une pseudo laisse de chien, le temps d'atteindre l'autre côté de la vallée. Et puis, vu la brise, il n'y a pas de raison que je n'ai pas cette brise pour rentrer. Dans le ciel, le voile s'est bien installé, cela ne devrait plus trop thermiquer. Ça va être tranquille pour finir.
J'arrive au dessus du Petit Brion et je commence à sentir des trucs bizarre. Je regarde les champs et contacte Antoine que j'ai réussi à récupérer en radio et qui m'attend à côté de la voiture au Gua.
« Antoine, ça va pas le faire, je vais pas y arriver. C'est Badgad ici ! J'essaye de poser où je peux ! »
En effet en l'air c'était devenu très malsain, l'aile part devant puis derrière l'instant d'après. La masse d'air est chaotique, le vario bipe pour m'indiquer une ascendance puis la seconde d'après, j'ai droit à un -3m/s (je vous laisse regarder les dernières mesures de la trace pour vous faire une idée). Je ne comprends vraiment rien à ce qu'il se passe. Je ne suis sous le vent de rien, je suis au dessus de tout ! Une confluence ? Ici ? Jamais entendu parlé. Des rouleaux ? Mais de où ? La voile continue de s'ouvrir, de se fermer. Elle est plus rapide que moi aux commandes. J'essaye de faire les oreilles pour la stabiliser un peu mais je n'arrive pas à les conserver, ça bouge trop.
Tant bien que mal, je repère un champ et cherche à m'y poser, mais la voile me déporte ailleurs comme si elle venait de se prendre une bonne droite. Je change de champ mais celui là non plus ne sera pas le bon, l'aile vient de se reprendre une bonne droite. Ne sachant pas dans quel sens poser, je prend celui qui est en dessous. Pas super mais on va faire avec. Et par je ne sais quel miracle (clairement, j'ai eu beaucoup de chance), je pose sur les deux pieds, entier, pas violemment avec un arrondi sur la fin. Je souffle pendant que la voile s'affale toute seule dans un arbre. Merde... mais je suis entier, c'est le principal.
Le scénario de ce qu'il s'est passé à cet atterrissage me tourne et me retourne la tête. Aérologiquement, j'ai quelques d'hypothèses mais je n'en conçois aucune.
- Il y aurait une confluence entre la brise de Grenoble et un catabatique qui serait arrivé plus tôt à cause du voile. Catabatique venant soit du Gua, soit directement des faces Est du Vercors.
- Le vent étant Nord Ouest, il serait rentré de travers sur la Montagne d'Uriol (celle séparant Vif de Saint-Paul-de-Varces) et je me serais retrouvé dans des rouleaux.
- Le voile qui se trouve être une enclume aurait-il pu être pour quelque chose dans cette basse couche malsaine ?
A peine posé, des voisins passent me voir pour prendre des nouvelles. Ils ont vu l'aile, et le pilote, se faire chahuter dans tous les sens. Antoine s'inquiète aussi, il cherche à me rejoindre. Je monte dans l'arbre constater les dégâts. Ça va être l'enfer et je n'ai qu'une envie, aller me poser chez moi. Un des voisins ramène du matériel et nous commençons à élaguer l'arbre pour récupérer la voile sans trop la casser. Je monte dans l'arbre puisqu'une échelle n'aurait pas trouvé d'appuis. L'arbre est très élastique et ne bronche pas sous mon poids, heureusement. Une fois au sol, nous retirons les dernières branches et je leur promet de leur apporter à boire pour les remercier.
Nous retournons au stade du Gua avec Antoine pour récupérer ma voiture, j'en profite pour faire une petite inspection rapide de l'aile et pour démêler une nouvelle fois les suspentes (la cinquième fois de la journée quand même). Je suis trop crevé pour faire une inspection complète maintenant avec le jour qui se couche. Nous débriefons avec Antoine pendant ce temps là. Il m'abandonne à cause d'une contrainte à 21h.
Je range mes affaires et quitte à mon tour le Gua avec un sentiment mitigé sur le vol et beaucoup de questions en tête. Qu'est ce qu'il s'est passé là bas pour l'atterrissage ? Comment va la voile ? Est-ce que j'ai bien fait de m'acharner à vouloir rentrer en volant ? Est-ce que me poser au Taillefer à 17h30 était raisonnable ? Est-ce que j'aurais dû abandonner plus tôt et rentrer en stop ? Est-ce que je me suis mis en danger inutilement ? Il y a toujours un risque à naviguer dans un milieu invisible mais à aucun moment je ne me suis senti en danger sauf à la fin. Mais cette fin, je ne pouvais pas la prévoir. Est-ce qu'il y avait des indices qui auraient pu m'indiquer que c'était malsain ? Est-ce que je n'ai pas sous-estimé ma fatigue ? Et pourquoi diable c'était malsain à souhait ici !? Je crois qu'il me faudra un peu de temps pour digérer tout ça.